Je vois le jour il y a 25 ans de cela, dans la petite ville de Khimki, juste à côté de Moscou, d'une mère Russe et d'un père Australien. Entre eux, pas de romance, pas d'histoire d'amour épique, ni de ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants. Ils se sont rencontrés à la fac. Mon père, maitre de conférences en arts, se rend à l'université d'arts appliqués de Moscou pour quelques semaines de séminaires. Son regard croise celui de maman, jeune étudiante de toute beauté. Quelques semaines plus tard, ils se fréquentent en toute discrétion bien sur. Il lui promet monts et merveilles et parvient à la mettre dans son lit. 9 mois plus tard, me voilà ! Mon père est retourné à Sydney, préparant notre arrivée à toutes les deux. Ce n'est peut-être pas un grand romantique, mais c'est un homme droit. Ma mère quitte donc son quotidien et part le rejoindre à Sydney.
Mon enfance est tout ce qu'il y a de banale et d'ennuyeuse : petite fille-modèle, j'excelle dans tout ce que j'entreprends, même en danse classique, bien que je déteste ça. Mes enseignants ne tarissent pas d'éloges sur mes talents d'écrivain, mais je n'en fais rien, passionnée par les gens. Très discrète, j'observe, j'analyse, je dissèque mon monde, tâchant d'en comprendre les fonctionnements, tâche bien ardue pour une enfant de 10 ans. Mais qu'importe. Je cherche, je questionne et j'écoute, j'écoute tout ce qui peut se dire autour de moi. J'entends d'ailleurs des choses que je ne devrais pas entendre
" Vous avez gâché ma vie toi et Anna ! Tu aurais dû avorter comme je te l'ai dit ! Tu serais resté à Khimki et j'aurais repris ma vie !"
C'est douloureux. J'avais donc gâché la vie de mes parents...génial ! Je grandis donc, convaincue de ne servir à rien et de gâcher la vie de tous ceux qui m'entourent. Jusqu'au jour où, je rencontre Austin, un nouveau dans mon lycée, bien plus âgé que moi. Il fait tourner toutes les têtes, et le moindre regard qu'il accorde à quelqu'un est considéré comme un cadeau précieux. Austin Mc Callister, un Irlandais de toute beauté, fils d'une riche famille apparemment. Je l'observe, le guette et analyse le moindre de ses mouvements. Il a l'air si décontracté, si sur de lui...mon opposé ! Je l'envie. Il a une vie sociale fournie, il est toujours entouré, aimé...le veinard.
Un beau jour, alors que je m'arrête dans un café avant les cours, je renverse maladroitement le contenue de mon gobelet sur un jeune homme : Austin. La honte ! Je rougis, balbutie et ne rêve que de m'enterrer sous terre.
Cette rencontre malheureuse changea ma vie. Austin s'intéressait à moi. Vraiment. Bien sur, il me l'avoue juste avant de quitter le lycée et d'entrer en école de commerce et de finance. Malgré cela, on se voit encore, de plus en plus, avant de devenir inséparables. On est jeunes, insouciants et pleins de projets : il aurait son diplôme, trouverait un emploi rapidement, quant à moi, je terminerais le lycée et poursuivrait mes études de psychologie. À 18 ans, alors que j'entame mon entrée en fac, je commence à parler mariage. Austin rechigne. Tant pis, j'attendrais. Durant ma deuxième année, il nous trouve un charmant petit appart en centre-ville. La parfaite petite vie du couple parfait. Mariage ? Toujours pas à l'ordre du jour. Pour me faire patienter, il me demande en fiançailles, m'offrant par la même occasion une bague énorme et tape à l'oeil, totalement pas mon genre.
Obsédé par son travail et ses ambitions, Austin change, abandonnant rapidement le jeune homme plein de grands rêves que j'aimais pour une sorte de requin de la finance. Il est de moins en moins présent, de plus en plus ronchon et ne vit que pour lui. Notre relation se détériore. Il rentre tard, se couche directement et part tôt au boulot...je ne lui sers plus à rien...je ne suis plus rien pour lui.
À la fin de mes études, je trouve rapidement un emploi. Major de ma promotion, je suis contactée par une agence qui veut s'offrir mes services en tant que "consultante". En voilà un bien grand mot. Apparemment, cette agence fait entrer des personnes à Sydney, des personnes à problèmes dirons-nous, des personnes que je dois rencontrer, et suivre, tout au long de leur vie ici. C'était grassement payé, c'était un poste sur et épanouissant. J'avais des patients assurés et des cas très intéressants à étudier. Le poste parfait. J'accepte avec grand plaisir...j'avais bien besoin de passion dans ma vie !
À 24 ans, je me lance et prends le relais après un vieux psy bourru qui rechigne à me donner les informations dont j'ai besoin. Mon premier patient, Samuel Nightingale, est un jeune homme pas très loquasse, qui ne me met pas particulièrement à l'aise. Il se méfie de moi, ne me parle pas et il me faut faire preuve de tout le tact et de la douceur nécessaire pour le mettre en confiance. C'est un homme charmant, très charmant, qui ignore alors que, si je suis censée l'aider, il est en quelque sorte la bouée de sauvetage dont j'avais besoin....

Que dire de moi...franchement, je ne suis pas la personne la plus passionnante que vous pourrez croiser à Sydney...Bon très bien. Je m'appelle donc Valentina Aryanna, mais je préfère Arya ou Val à la limite. Anna, c'est ma mère qui m'appelait comme ça, donc bon, j'ai un peu du mal à l'entendre dans la bouche d'autres personnes. J'aime...mon métier (je suis psy depuis peu) et à peine sortie de la fac, j'ai trouvé le poste de mes rêves. J'aime mon fiancé... Du moins je crois...enfin il me semble. J'aime les chats, j'en ai un à la maison, moustache. Oui je sais, pas très original, mais je manquais d'inspiration. Je n'aime pas le chocolat, chose surprenante pour une femme. Par contre, je tuerais pour du caramel ! J'aime cuisiner et il paraît que je ne suis pas mauvaise. Par contre je déteste faire la vaisselle...les lave vaisselles sont là pour ça non ? Je n'aime pas le sport...franchement, se faire souffrir, suer, rougir, tout ça pour quoi ? Perdre du poids . Il suffit de ne pas en prendre, c'est bien plus simple ! Je préfère surveiller mon alimentation, pas de soucis comme ça ! Austin tente de m'entrainer avec lui à ses séances de footing...peine perdue ! S'il y a bien une que j'exècre, c'est de courir pour rien. A vrai dire, je suis quelqu'un de casanier : j'ai mes petites habitudes, mon petit train train,, qui me conviens parfaitement. J'aime lire, beaucoup et écrire aussi. J'aime me poser sur ma terrasse ou dans un parc, avec un bon livre et le dévorer. Ça c'est le pied ! Je n'aime pas l'alcool, ou plutôt l'effet qu'il peut avoir. Je n'aime pas perdre le contrôle, ni de moi, ni des évènements. Austin lui, il boit un peu trop à mon gout.
Je n'aime pas les hypocrites, les gens faux, les histoires d'enfants...je n'ai plus 15 ans ! On me dit parfois trop sérieuse, mais je n'en ai pas l'impression. Je suis sérieuse oui ! Je ne suis pas du genre à rire de choses stupides, ou à m'extasier devant n'importe quoi, tout simplement. J'entends encore Austin "t'es trop cérébrale Ary". J'ai souvent envie de lui répondre "c'est sur que quand on ne l'est pas du tout, n'importe qui, qui l'est un peu semble incroyablement cérébral", mais ça ne serait pas très sympathique...et puis les conflits, ce n'est pas mon truc.
J'aime les relations simples et sincères. Je ne sais pas jouer la comédie : si j'aime, j'aime et si je n'aime pas...c'est pire ! Je ne suis ni mauvaise, ni rancunière et je pardonne vraiment facilement, mais, me prendre pour une poire serait une grossière erreur. Je suis bien trop intelligente pour ça ! Je suis d'une sincérité déconcertante, qui plaît ou met mal à l'aise. Mais qu'importe. Je n'y puis rien.
En bref. Je suis une personne comme les autres, avec mes qualités et mes défauts. Je suis d'une gentillesse sans bornes, je donne volontiers de moi, j'ouvre mon cœur et j'y fais une place à tous ceux qui le désirent, mais comme tout le monde, il y a une partie cachée en moi, une partie secrète, beaucoup moins réjouissante que ma façade. Celle-ci, je n'y donne accès à personne...en tant que psy, ce n'est pas une chose bien compliquée en soi On sourit, on détourne les conversations et on laisse penser que tout va bien dans le meilleur des mondes...comme chez les bisounours et voilà qui est fait ! Contrairement à mes patients, je n'ai pas de lourds secrets qui ont donné un tournant radical à ma vie, mais j'ai moi aussi mes blessures et mes meurtrissures, avec lesquelles il me faut composer au quotidien.  

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